Guérison, ou illusion ?

Tous les jours Sanosuke se rappelait du moment où le couperet était tombé, où la nouvelle lui avait été annoncée. Il se rappelait de tous les détails de la pièce où il était, de chaque expression sur le visage du médecin devant lui et, surtout, du regard fuyant de ce dernier. Sanosuke était resté silencieux pendant toute la conversation, non pas par incompréhension mais parce qu'il ne savait pas quoi dire. Le médecin semblait sûr qu'il n'y avait rien à faire, pour le moment et, durant toute la conversation, il mentionna sept fois à Sanosuke l'importance de prendre du repos. Sept fois. Le concerné se rappelait de chacune d'entre elles et, à chaque mention, c'était comme un coup de poignard dans son torse.
Pourquoi ? Parce qu'il savait ce que cela voulait dire. Il savait que le repos était la première étape vers la mise à pied et, s'il avait déjà été rétrogradé, qu'est-ce qui pouvait bien empêcher les instances supérieures de le mettre à pied, pour de bon ? Ce vingtième siège était sa dernière chance et il le savait bien, aussi souhaitait-il mettre toutes ses chances de son côté, afin que ce poste ne soit pas son dernier. Il ne supporterait que son parcours s'arrête ici.

Les entraînements n'avaient rien donner, n'ayant servi qu'à ne rendre sa faiblesse que plus réelle. Il ne pouvait pas continuer ainsi, cela ne menait à rien, aussi commença t-il à chercher d'autres idées, d'autres solutions, même éloignées de son territoire d'origine. Et, après quelques recherches, l'existence d'un établissement lui fut mentionnée, du côté de ses collègues de la division occidentale. Un établissement comportant sources chaudes et autres méthodes permettant, apparemment, d'aider les corps à se détendre et, peut-être, à guérir. Cela ne valait-il pas le coup d'essayer ? Ce n'était pas comme s'il avait quoi que ce soit à perdre, de toute façon.

Le trajet fut long et pénible mais, en arrivant, le regard pétillant de curiosité du Takamoto se perdit çà et là, comprenant qu'il était effectivement très loin de chez lui. Ici tout était plus...grand, plus solide, plus massif. Ce n'était pas très beau, selon son point de vue en tout cas, mais la ville était imposante, et le château royal l'était encore bien plus. Qu'est-ce que cela pouvait faire, de vivre dans un lieu comme celui-ci ?
Curieux, il demanda rapidement son chemin, ce qui lui valu quelques réflexions et regards curieux car, entre son kimono noir, son haori bleu foncé sur les épaules et son zanpakuto à la ceinture, il avait vraiment l'air de ne pas être ici. Effectivement, il portait la tenue de chez lui, il était fier de ses origines alors pourquoi s'en cacher ? Enfin, après avoir arpenté le port pendant quelques minutes, le regard bleu-gris du colosse accrocha l'enseigne du bâtiment qu'il recherchait.



Prenant une profonde respiration, gardant une masque de maintien, masquant la douleur qui enserrait son corps à chacun de ses pas, l'homme poussa la porte de l'établissement et, balayant l'entrée de ses prunelles claires, fit connaître sa présence d'un simple :



Cela se voyait à sa dégaine qu'il n'était pas juste un touriste ou un civil mais, puisqu'il n'était pas chez lui, il ne pouvait pas rentrer dans les détails, pour le moment. Il n'était pas naïf au point de croire que ce seul établissement pourrait faire la différence, mais peut-être donnerait au corps du Takamoto le coup de pouce dont il avait besoin, pour amorcer une guérison désespérément souhaitée.

Il n'avait pas le luxe de faire la fine bouche. Il devait saisir toutes les opportunités, à sa portée.